Caravage : le maître du clair obscur illumine les salles

Le Biopic d’1h58 de Michele Placido réunit Riccardo Scamarcio, Louis Garrel et Isabelle Huppert. 

Pour adapter à l’écran la vie d’un si grand peintre, il fallait de l’ambition et un certain cran technique. Pari réussi pour Michel Placido et son drame franco-italien. Plus qu’une vie, c’est l’éclat d’une personnalité  qui transparaît, illuminée par la lumière crue de la passion. 

Nous voilà plongé dans les tableaux de Caravage. À la lueur des bougies et de la lune, les plans intimistes et chaleureux se succèdent, laissant place aux murmures et aux interdits. Le spectateur voyeuriste admire alors des plans aux tons ambrés et ombrés défiler, révélant ainsi les mystères autour de cet artiste si fantasmé.

Pour retranscrire la vie d’un homme aussi sulfureux et romanesque, l’on pouvait s’attendre à une expérience digne d’un film cape et d’épée ou un réquisitoire manichéen contre l’Église catholique. Heureusement, Placido nous épargne ces platitudes en nous offrant une réalisation singulière et nuancée. Aucun snobisme pourtant ne transparaît dans ce film qui se veut grand public. On apprécie la prestation brillante d’un Riccardo Scamarcio incandescent et celles de Micaela Ramazzotti et de Lolita Chammah jouant le rôle de muses courtisanes. 

Les amoureux de l’histoire aimeront les apparitions de figures emblématiques comme Giordano Bruno ou Artemisia Gentileschi ou encore des reconstitutions magistrales de certains tableaux du Caravage. Le personnage de l’ombre a également le mérite de montrer toutes les tensions qui cristallisent Rome et la Contre-Réforme.

Si l’on regrette que le film centre sa narration sur le personnage de l’ombre, on apprécie les longueurs scénaristiques contemplatives nous donnant à voir les paysages époustouflants d’Italie. 

Le film déploie sa narration grâce à une série d’épisodes puissants, isolés mais cohérents, venant montrer la vie du Caravage par à-coups. C’est le portrait d’un Caravage profondément humain, insaisissable et torturé qui nous apparaît. L’interprétation du peintre se pare d’ambiguïté, si bien que le spectateur n’est jamais sûr de rien. 

Loin de l’académisme auquel on rapproche son œuvre, c’est un art vivant, populaire et audacieux, qui resplendit de mille feux. Le film arrive à saisir la beauté derrière chaque humain et illumine les bas-fonds pour mieux saisir le message des évangiles.

Ici les mendiants côtoient les papes, et les cardinaux s’abaissent devant les filles de joie. La force de l’art du maître est d’être politique mais pas polémique. Caravage n’a jamais semblé aussi accessible…  

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